En intégrant les thérapies numériques dans les stratégies de santé publique, nous pouvons améliorer non seulement la qualité des soins mais aussi l’efficacité et la portée de la prévention primaire et secondaire.
Grâce à leur approche personnalisée et proactive, les thérapies numériques permettent d'identifier et d'agir sur des facteurs de risque spécifiques, avant qu'ils ne se transforment en co-morbidités. En produisant des changements de comportement durables, en favorisant des habitudes de vie saines, les DTx peuvent réduire significativement l’incidence des maladies cardio-vasculaires, cancers, et décès prématurés sur le long terme.
Les effets d’échelle permettront d’éviter massivement des maladies et des soins très coûteux pour la société.
De plus, la prise en charge “à distance” permise par les thérapies numériques devrait soulager les professionnels de santé les plus sollicités, en particulier les médecins généralistes et en zone rurale. Même si elles ne remplacent pas le suivi médical, ni la relation thérapeutique, les DTx peuvent par exemple réduire le nombre de consultations, de visites aux urgences, d’hospitalisations ou d’ITT.
Dans un contexte de pandémie comme celui que nous avons connu avec le Covid-19, les thérapies numériques offrent des solutions pour absorber les pics de besoins en santé mentale, pour aider les patients chroniques à gérer leur pathologie depuis chez eux, et pour alléger la pression sur les établissements et professionnels de santé surchargés.
DTx est l’abréviation de Digital Therapeutics, littéralement “thérapies digitales” en anglais. En français on préférera l’expression “thérapies numériques” pour désigner les applications patient :
- Qui ont un bénéfice clinique démontré par une ou plusieurs études randomisées contrôlées, au critère de jugement significatif
- Qui peuvent être prescrites par un médecin ou professionnel de santé
- Qui peuvent être prises en charge par une assurance maladie, publique ou privée.
Ces thérapies numériques sont conçues pour améliorer les symptômes et la qualité de vie de patients chroniques : diabète, hypertension, acouphènes, lombalgie, obésité, douleurs chroniques, TCA, addictions, troubles du sommeil, endométriose… Elles proposent généralement un programme d’activités personnalisé :
- exercices, activité physique
- apprentissage de techniques de relaxation
- lecture ou écoute de contenu d’éducation thérapeutique
- auto-suivi des symptômes dans un journal de bord
Le support digital permet de prolonger, au-delà de la consultation, les recommandations du médecin pour adopter durablement les changements comportementaux nécessaires.
Pour aller plus loin, lireDe l'Approche globale du patient à la prévention : le rôle transformateur des applications mobiles thérapeutiques (DTx) en santé
Au delà de l’impact immédiat des thérapies numériques, démontré dans une étude RCT qui valide la revendication clinique du produit, ces programmes thérapeutiques jouent un rôle probablement décisif dans la prévention primaire et secondaire.
Le principal mécanisme d’action de ces applications santé est la mise en place d’habitudes de vie saines, en jouant sur la nutrition, l’activité physique, le sommeil, la respiration, la vie sociale… Des comportements qui sont expliqués et promus par le médecin en consultation, mais ne sont adoptés dans la durée que par la répétition d’efforts minimes au quotidien.
Les thérapies numériques complètent la médecine conventionnelle dans le traitement, la gestion et la prévention d'un large éventail de maladies chroniques et mentales.
Elles permettent aux patients d'accéder, en dehors du cabinet médical ou de l’établissement de santé, à des options thérapeutiques cliniquement éprouvées, élargissant ainsi l'accès aux soins médicaux nécessaires.
En fournissant une intervention médicale directement aux patients, et en instaurant des pratiques de vie et de consommation saines et équilibrées, les thérapies numériques créent une valeur substantielle dans l'amélioration de la santé de la population. Pour aller plus loin, lire De l'Approche globale du patient à la prévention : le rôle transformateur des applications mobiles thérapeutiques (DTx) en santé
Les thérapies numériques sont réglementés comme des dispositifs médicaux. Cela signifie qu’elles doivent :
- Documenter leur conformité aux exigences des normes et règlements tels que le MDR (Règlement 2017/745 relatif aux dispositifs médicaux), la norme ISO 13485 (Système de management de la qualité), ISO 62304 et ISO 82304 (développements logiciels), ISO 14971 (Risques). Cette conformité peut être auditée par des organismes notifiés.
- S'enregistrer auprès des agences de réglementation nationales, telles que l’ANSM en France
- Respecter les réglementations adéquates en matière d'étiquetage et de publicité.
- Démontrer que les revendications de leur produit sont factuelles et étayées par une validation clinique, un statut réglementaire et une autorisation de mise sur le marché.
La surveillance réglementaire de ces dispositifs est fondée sur le niveau de risque généré pour les patients.
Pour en savoir plus, lire PECAN : Comment la France évalue et rembourse les applications mobiles thérapeutiques
Comme pour les médicaments, il y a un enjeu fort autour de l’observance des patients pour ces thérapies numériques. Il est cependant beaucoup plus facile de mesurer cette observance que celle d’un médicament, en mesurant la fréquence et durée d'utilisation de l’application par exemple.
Par ailleurs, la plupart des applications intègrent des fonctionnalités permettant d’intervenir en cas de “décrochage” : envoi d’une notification personnalisée, rappels, personnalisation du contenu, etc.
Pour en savoir plus, lire Les leviers d’adoption des DTx par les patients : mécanismes d’usage et de rétention
L’Allemagne rembourse les thérapies numériques DTx (et non pas de télésurveillance) depuis plusieurs années (programme DiGA). Les premiers mois, l’autorité équivalente à la HAS, la BfArm, acceptait en moyenne une nouvelle application mobile thérapeutique par mois ; aujourd’hui c’est plutôt 2 par mois. En l’espace de 2 ans, les médecins allemands ont prescrit environ 250 000 thérapies numériques aux patients.
La Belgique a instauré également son propre mécanisme de prise en charge des DTx (mHealth), tout comme la France (PECAN) et le Royaume-Uni. Des cadres pour les paiements nationaux ou régionaux existent également au Japon, en Corée du Sud et au Royaume-Uni.
Aux États-Unis, les thérapies numériques sont le plus souvent payés par des employeurs, des Pharmacy Benefit Managers (PBM), des assureurs ou d'autres tiers payeurs. Les DTx peuvent être couverts par la prestation médicale, la prestation pharmaceutique ou par d'autres formes de contrats. Dans certains cas, les établissements peuvent recevoir un paiement groupé dans le cadre d'un groupe lié au diagnostic (DRG), tandis que les prestataires agréés qui prescrivent ou autorisent les produits DTx peuvent être remboursés pour leur temps dans le cadre d'honoraires professionnels tels que les codes CPT.
Les programmes publics aux États-Unis, tels que Medicare et Medicaid, travaillent encore à déterminer comment reconnaître officiellement les thérapiesnumériques et y donner accès aux patients.
Pour en savoir plus, lire PECAN : Comment la France évalue et rembourse les applications mobiles thérapeutiques et Le Marché des applications mobiles thérapeutiques : Allemagne, États-Unis et France
Les DTx s’inscrivent dans les usages technologiques d’aujourd’hui, et permettent une prise en charge plus accessible et plus personnalisée.
Comment ? En fournissant depuis le smartphone des patients un accompagnement quotidien. Ces logiciels à visée thérapeutique sont évalués cliniquement pour le traitement, la gestion et la prévention d’un large éventail de maladies et de troubles.